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Troubles oppositionnels avec provocation
(approfondissement)

Travail

Ce travail a été réalisé en collaboration avec Amélie BEAUVOIS, Mailys de MATHELIN et Mallaury MOOREN.

Il comprend trois parties :

  • Nos recherches sur "les habiletés sociales des enfants ayant des troubles oppositionnels avec provocation"

  • Nos recherches sur "le jugement moral selon Piaget et Kohlberg"

  • La présentation d'une méthode de travail avec des jeunes ayant des troubles oppositionnels.

Les habiletés sociales

Selon Baghdadli (pédopsychiatre) et Brisot-Dubois (logopède) en 2011, les habiletés sociales correspondent à « l‘ensemble des capacités qui nous permettent de percevoir et de comprendre les messages communiqués par les autres, de choisir une réponse à ces messages et de l’émettre par des moyens verbaux et non verbaux, de façon appropriée à une situation sociale [1]».

Les habiletés sociales font partie de la compétence sociale. Cela correspond au degré d’élaboration et d’entretien des relations satisfaisantes avec les autres.

En 1997, Goldstein (professeur en psychologie et éducation) et McGinnis (institutrice primaire et spécialisée) ont rédigés une liste de cinquante habiletés sociales, divisées en six catégories. Cette liste est adressée aux enfants de niveau secondaire.

Les enfants ayant des troubles du comportement ont un faible niveau d’habiletés sociales. Ils éprouvent des difficultés à interagir avec les autres, à créer et à entretenir des relations d’amitié, à gérer leurs émotions et les imprévus… Cela les amènent souvent à adopter des attitudes inadaptées et inappropriées avec leur entourage (agressivité, violence, non-respect des règles, etc.). Ces attitudes provoquent un rejet de la part des enfants se situant « dans la norme ». Cela poussent les enfants ayant des troubles du comportement à se marginaliser et pour certains, à fréquenter des personnes déviantes.

 

Ce rejet social ainsi que l’influence des  leurs fréquentations entraine un déficit au niveau de leurs habiletés sociales. 

Cela peut aussi entrainer des conséquences au niveau scolaire telles que :

  • Un retard dans l’acquisition de certaines compétences

  • Des réprimandes régulières de leur enseignant

  • Un rendement scolaire faible

 

Par contre, quand le contexte scolaire ou familial est optimal, les enfants ayant des troubles du comportement voient les difficultés d’adaptation diminuer. 

 

L’enjeu avec ces enfants sera d’anticiper leurs comportements afin d’amoindrir les facteurs à risque. L’enjeu sera également d’utiliser ses habiletés sociales de manière positive et efficace. Ceci leur permettra d’être acceptés par leurs pairs et de construire des relations saines avec ceux-ci.

 

[1] Chambres, E. (2015). Habiletés sociales et théorie de l’esprit. En ligne : https://www.pluradys.org/wp-content/uploads/2011/10/Diaporama-Habiletés-sociales-OK-1-Dijon-copie-site.pdf, consulté le 26 novembre  2018

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Le jugement moral

Distinguons « jugement » et « morale » :

  • Le concept de jugement vient du verbe « juger ». Le jugement est la faculté de l’esprit permettant de différencier le bien du mal. Lorsque l’on émet un jugement, cela veut dire que l’on pose une opinion, un avis. Tout jugement est subjectif, puisque l’individu se fait une opinion personnelle sur quelqu’un ou quelque chose sans que cette opinion soit étayée par un témoignage, une recherche ou autre.

  • La morale est liée aux valeurs, aux croyances, aux coutumes d’un groupe social ou d’une seule personne. Elle permet de distinguer ce qui est correct de ce qui ne l’est pas. On peut la visualiser comme une sorte de guide pour nos agissements.

 

Le jugement moral est donc un acte mental liant ces deux composantes : il se base sur des normes et des règles acquises tout au long de la vie afin d’établir ce qui est jugé « éthique » ou au contraire ce qui manque de principe.  Le jugement moral dépend donc de chaque individu.

 

Tout au long de notre vie, notre environnement (la famille, l’école, la société, etc.) nous dicte ce qui est bien ou mal. Cependant, chaque individu réagit de manière différente face à ces impositions ; soit en les acceptant, soit en les rejetant, soit en les ignorant.

 

Ces trois comportements fondent les étapes du jugement moral, établi dans les années 1960 par le psychologue américain Lawrence Kohlberg. Celui-ci s’est inspiré du développement cognitif de Jean Piaget, un psychologue suisse.

 

Pour développer le jugement moral, Kohlberg s’est servi de dilemmes moraux (situations hypothétiques ayant des choix restreints, dont l’issue pose un problème moral). C’est la justification de ce choix qui va déterminer le stade d’évolution morale, et non l’issue choisie.

 

Ce modèle se séquence en trois niveaux, chacun divisé en deux stades. Ils se développent par étapes successives ; ils sont irréversibles, intégratifs (une personne ayant acquis un stade supérieur peut comprendre les raisonnements des personnes des stades précédents) et transculturels (toutes les cultures suivent le même développement).

 

L’évolution du jugement moral repose sur une hiérarchie passant du moins moral au plus moral :

1. La moralité préconventionnelle

Elle est caractérisée par une perception des règles extérieures à l’enfant. La personne est limitée par son point de vue égocentrique. À ce stade, elle ne prend pas en compte l’intérêt des autres.

 

Stade 1 : il est orienté vers une obéissance à l’autorité, ainsi qu’un évitement de la punition. L’enfant est centré sur les conséquences directes de ses actions sur lui-même.

 

Stade 2 : il est orienté vers l’intérêt personnel. L’enfant se concentre, de manière égocentrique, sur les récompenses et les avantages qu’il peut percevoir.

2. La moralité conventionnelle

Elle est caractérisée par une comparaison des opinions et des attentes de la société, afin de poser une action morale. L’individu intègre et accepte les conventions de la société concernant le bien et le mal. Il suit les règles et les normes de manière rigide, sans penser aux conséquences possibles.

 

Stade 3 : il est orienté vers la recherche de la satisfaction des attentes du milieu et le maintien des bonnes relations. L’individu a appris l’avantage d’être jugée positivement.

 

Stade 4 : il est orienté vers le respect de la loi et des conventions sociales. La morale est dictée par une force extérieure ; par conséquent, violer la loi est moralement condamné.

3. La moralité postconventionnelle

Elle est caractérisée par une indépendance de pensée de l’individu. Les personnes se situant à ce stade peuvent désobéir aux règles si celles-ci sont incompatibles avec leurs propres principes.

Les règles sont perçues comme des mécanismes utiles, mais modifiables. Les droits fondamentaux de la personne tels que la vie, la liberté et la justice sont au centre.

 

Stade 5 : il est orienté vers le contrat social. Ainsi, les lois sont considérées comme des contrats sociaux plutôt que comme des règles rigides. Le plus grand bien pour le plus grand nombre de personnes prime. Ce postulat permet de modifier des lois qui ne seraient pas sur le même postulat.

 

Stade 6 : il est orienté vers des principes moraux universels. L’individu se base sur une pensée éthique afin de raisonner moralement. Dans ce stade, les lois sont valables uniquement si elles sont fondées sur la justice.

Contrairement aux stades précédents, la personne agit au nom de la justice, et non parce qu’elle évite la punition. Elle agit dans son meilleur intérêt ou parce que c’est ce qui est attendu ou convenu.

 

La population adulte a tendance à agir selon les stades 3 et 4 du niveau conventionnel. Seuls 15% de la population atteindrait le stade 6, selon Kohlberg. 

Présentation de la méthode

Cette méthode s’inspire de différents approches comportementales et cognitives dans l’éducation des jeunes à conduite agressive. Vous y retrouverez une partie de la technique du contrat comportemental ainsi que l’entrainement des habiletés sociales.

Il nous semblait nécessaire de fusionner les différents principes afin d’accéder à une méthode performante.

Celle-ci se déroule en 4 étapes, nécessitant tout au long une structure particulière de l’environnement ainsi qu’un cadre calme et constant.

1. Structure de l'environnement

Chaque enfant a besoin de structure et d’organisation, et plus particulièrement les enfants ayant des troubles oppositionnels. Ceux-ci n’ont bien souvent pas eu, ou peu, de référents stables (comme les parents) pour leur offrir les points de repères nécessaires. Ils n’ont pas pu explorer leur environnement comme les autres enfants et ont été privés de nombreuses expériences fondamentales à leur bon développement. Par conséquent, il leur arrive d’avoir des problèmes pour se repérer dans le temps et dans l’espace.

 

Il serait donc intéressant d’instaurer différents coins spécifiques afin de poser un cadre précis. En effet, une structuration spatiale claire et adaptée permettra à l’enfant de mieux se retrouver dans les apprentissages. Ces coins permettent de justifier et d’automatiser le moment d’apprentissage aux yeux des jeunes. En effet, si c’est l’heure du coin individuel, le jeune sait qu’il va travailler de manière individuelle.

 

Avoir une bonne structuration spatiale va permettre à l’enfant de s’organiser et d’améliorer sa concentration; de sorte qu’il aura davantage de chance de réussir sa tâche. Elle favorise également l’autonomie du jeune.

 

Afin de comprendre au mieux son environnement, le jeune doit être entouré d’un espace physique organisé. Celui-ci doit être divisé en différentes zones, chacune délimitées et dévolues à une tâche spécifique. Ces zones doivent rester fixes afin de permettre à la personne d’anticiper ce qu’il va pouvoir y faire et de diminuer son angoisse en lui procurant un sentiment de sécurité.

 

Nous pouvons retrouver diverses des zones telles que :

o  Un coin spécial pour se calmer et retrouver son « stop ».

o  Un coin pour manger

o  Un coin bibliothèque

o  Un coin dédié au travail individuel

o  Un coin dédié au travail de groupe

o  …

 

Il est important de préciser que la structure spatiale ne se limite pas à la disposition des lieux. La manière dont l’adulte va présenter l’activité aux jeunes ainsi que la disposition même de l’activité engendrera également plus ou moins d’autonomie et de réussite.

 

Il est également important de donner à l’enfant des repères montrant le temps qui passe.

Pour ce faire, différents outils peuvent être mis en place :

  • Une banderole calendrier : On construit en classe une banderole avec les enfants sur le temps qui passe. On commence par le faire de façon quotidienne; pour ensuite passer à l’hebdomadaire et terminer par le mensuel. Au fur et à mesure de sa construction, il est nécessaire de laisser les traces au mur pour que les jeunes se rendent compte du temps passé.

  • Un horaires des enfants (quotidien et hebdomadaire) avec les différentes activités illustrées que l’on enlève dès qu’une activité est terminée.

  • Une création et un affichage des souvenirs, des évènements particuliers

  • Etc.

2. Prise en charge

2.1 Travail sur les émotions et les habiletés sociales

Afin d’améliorer les relations des personnes atteintes de troubles oppositionnels, nous allons procéder par étapes afin de travailler sur les émotions et les habiletés sociale.

 

Les jeunes ayant des troubles éprouvent une certaine difficulté à entrer en contact avec les autres de manière positive. Cette difficulté est due à l’incompréhension de leurs émotions. Il est donc nécessaire qu’ils identifient et comprennent leurs émotions afin de pouvoir les communiquer. De plus, il est aussi important s’il on souhaite créer une relation avec autrui de percevoir les émotions des autres.

 

Entraîner les habiletés sociales est nécessaire pour établir des relations avec autrui. Il faut donc combler les lacunes des personnes avec un trouble oppositionnel en créant un registre de réactions à mobiliser dans diverses situations.

L'entraînement aux habiletés sociales consiste en un apprentissage planifié et systématique des comportements attendus. Le but est donc de construire avec le jeune un répertoire d’interactions interpersonnelles adaptées à des contextes variés.

 

Pour cela, nous allons passer par différentes étapes :

 

Etape 1

A. Proposer aux jeunes une situation problème complète (via une BD, vidéo ou autre).

Exemples:  https://www.youtube.com/watch?v=DBDNGjfSUHc

 

B. Brainstorming des solutions, des réactions possibles, pendant environ 15 min. Les jeunes proposent toutes leurs idées sans censure. Même les idées les plus farfelues sont les bienvenues.

Exemples des propositions :

  • Aller dans ma chambre.

  • Râler dans mon coin.

  • Frapper dans un mur.

  • Expliquer à ma soeur d’arrêter car cela fait mal.

  • Taper ma soeur.

  • Aller le dire à Papa.

  • Aller crier très fort dans ma chambre.

  • Aller marcher dehors.

  • Pleurer et me plaindre jusqu’à ce que qu’elle aille engueuler ma petite soeur.

  • Joueur au ballon (me défouler).

  • Se venger en lui cassant un de ces jouets.

  • Lui demander d’arrêter.

 

C. Voter pour la solution les plus adaptée.

Exemple : expliquer à ma soeur d’arrêter car cela me fait mal. C’est la solution qui peut engendrer un meilleur comportement plus tard.

 

D. Rejouer la situation sous forme de jeux de rôle, en incluant la solutions choisie.

 

Etape 2

A. Les accompagnants proposent une situation problème incomplète (BD, vidéo ou autre)​

 

B. Les jeunes doivent expliquer ce qu’ils ressentiraient dans cette situation.

Ex : « Je me sens en colère car… », comment exprimer leur colère avec un bonhomme (avec leur poings, en criant…).

 

C. Les accompagnants proposent de créer aux jeunes leur « stop ». Un objet qu’ils peuvent prendre pour signifier l’arrêt de leur colère croissante afin d’éviter une crise.

 

Etape 3

A. Les accompagnants proposent une situation problème incomplète (BD, vidéo ou autre).

 

B. Les jeunes expérimentent l’emploi du stop via des jeux de rôles reprenant la situation de l’étape A. Ils observent les différentes situations et indiquent l’endroit où ils doivent utiliser leur stop.

 

Etape 4

⇒ Répéter plusieurs fois le processus.

 

2.2 Mise en place d’objectifs personnalisés

Une fois que les différentes étapes ont été vécues et que le jeune a intégré les comportements attendus, il faut passer aux objectifs personnalités. L’objectif peut être perçu comme un contrat passé avec le jeune.

L’accompagnant fixe avec l’enfant un objectif spécifique. À la fin de la journée, l’enfant s’autoévalue pour déterminer si oui ou non il a rempli son objectif.

Si l’objectif est atteint, il est alors remis à l’ordre du jour pour le reste de la semaine. À la fin de la semaine, l’objectif est de nouveau évalué par le jeune et par l’accompagnant. Le jeune doit pouvoir exprimer son ressenti: ce qu’il a aimé ou pas aimé, comment a-t-il vécu sa semaine, lui demander s’il est fier de ses efforts, ce qu’il pourrait encore améliorer... En fonction de son avancée, l’accompagnant peut décider de prolonger l’objectif ou d’en poser un nouveau.

3. Calme et constance

Toutes les règles doivent être appliquées calmement et de façon constante.

 

Afin d’assurer une constance, il est préférable que la personne de référence ne varie pas ; le jeune saura ainsi construire une relation de confiance privilégiée et petit à petit se sentir à même de se confier au référent.

 

En effet, Michel Born et Vinciane Chevalier, travaillant au Service de Psychologie de la Délinquance et du Développement Psychosocial à l’Université de Liège, expliquent que « la prise en charge spécialisée s’attache à combler les carences affectives, à élaborer les conflits infantiles non résolus, à restaurer les relations et à offrir des modèles d’identification. » (Born Michel & Chevalier Vinciane, année)

 

De plus, il est primordial que la personne de référence garde son calme lorsqu’elle s’adresse au jeune. En effet, celui-ci a besoin de modèles, d’exemples de conduites socialement acceptables. S’il se trouve confronté à un adulte colérique ou violent, il risque de ne pas modifier son propre comportement.

 

Les personnes de référence peuvent être les parents, les éducateurs, les accompagnants…

 

Afin de pouvoir stocker les comportements attendus dans la mémoire à long terme, il est nécessaire de répéter les situations. Au plus le jeune va être confronté à des situations diverses lui demandant une réaction appropriée, au plus les comportements seront intégrés.

Pour conclure ce travail, nous pouvons reprendre la "règle des C" stipulant qu'il faut: “instaurer un Cadre Cohérent comportant des Consignes Claires, avec Consensus sur les Conséquences, et à les appliquer avec Calme et surtout de façon Constante”.

Présentation trouble OPPO

Présentation trouble OPPO

Lire la vidéo

Petite vidéo illustrant la méthode.

Sources

Bibliographie

  • Claudine Leleux, « Théorie du développement moral chez Lawrence Kohlberg et ses critiques (Gilligan et Habermas) » dans Jean-Marc Ferry et Boris Libois (dir.), , Bruxelles, 2003, Éditions de l’Université de Bruxelles, coll. « Philosophie et Société », pp. 111-128.​

Webographie

  • Bellerose, M. P. (2016). Trouble du comportement et habiletés sociales : perceptions d’enseignants liées à l’utilisation d’activités de plein air à des fins d’intervention pédagogiques( Master’s thesis). Université du Québec, Rimouski. En ligne : http://semaphore.uqar.ca/1223/1/Marie-Pier_Bellerose_juin2016.pdf, consulté le 26 novembre 2018.

 

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